Campagne des régionales 2015 d’Alain Rousset : « plusieurs milliers de pièces » à l’appui d’une plainte pour détournement de fonds publics 

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David Angevin est à l’origine de l’enquête ouverte par le PNF pour détournement de fonds publics (DR)

Ancienne « plume » du président PS de la région Nouvelle-Aquitaine Alain Rousset, David Angevin a été licencié fin janvier 2020, et il soumet cette « éviction politique » à l’appréciation du tribunal administratif de Poitiers. L’ancien membre du cabinet a aussi, début mars 2021, déposé plainte contre X auprès du parquet de Bordeaux pour des faits délictueux commis à l’occasion de la campagne des élections régionales 2015 menée par Alain Rousset et les membres de son cabinet, ainsi que des fonctionnaires du conseil régional. C’est de détournement de fonds publics dont il précise alors qu’il lui paraît s’agir. « Au vu du nombre phénoménal de pièces apportées » en appui d’accusations « graves », le procureur Frédérique Porterie l’a transmise au parquet national financier (PNF) aux fins de son instruction. Après la perquisition menée dans les locaux de la collectivité, le 04 mai dernier, David Angevin a de nouveau été entendu. Des dizaines de personnes pourraient l’être à leur tour. Loin de lui l’idée de viser spécialement le patron de la Nouvelle-Aquitaine, au demeurant bien parti pour être réélu dimanche prochain. C’est un modèle de gouvernance qu’il met en cause. Un modèle dont l’opinion, en premier, ne voudrait plus.

À ce jour, la plainte pour des faits délictueux commis à l’occasion de la campagne des élections régionales 2015 menée par Alain Rousset et les membres de son cabinet, ainsi que des fonctionnaires du conseil régional déposée par l’ancien membre du cabinet du président de la région Nouvelle-Aquitaine David Angevin n’occupe guère la campagne des régionales 2021. Le licenciement dont il a fait l’objet avait pourtant été évoqué dans Causeur le 05 juin 2020, et la plainte qui a abouti à l’ouverture d’une enquête préliminaire dont le PNF a la charge a été révélée par Marianne, le 09 mars 2021, avant que Valeurs actuelles en fasse à son tour état le 16 avril 2021. Avec sa plainte, David Angevin a ensuite fourni « plusieurs milliers de pièces » à l’appui des faits qu’il dénonce : avoir eu recours à des agents pour des tâches non conformes aux emplois prévus, en les mobilisant dans le cadre de la campagne des régionales 2015. Plus de trente personnes sont citées, et il est précisé que « tous les membres du cabinet sont des militants politiques qui ont fait campagne 24h/24 en toute connaissance de cause », à la différence de personnels assistants ou secrétaires, qui auraient été contraints d’y participer, faute de prendre la porte. David Angevin a donc lui-même, en qualité de « plume », été de ceux-là. S’il a « gardé le silence », c’est par peur d’être lui aussi « dégagé ». Or, à titre personnel, il était le seul à pouvoir assurer le quotidien de sa famille. « Je n’avais pas le choix ». En outre, le collaborateur « ignorait » pouvoir être lui-même mis « en situation délicate ». Au fur et à mesure des années, il en « prendra conscience » et s’en ouvrira à des membres du cabinet. Par ailleurs, le plaignant soutient, pièces à l’appui toujours, que « des consignes avaient été données aux membres du cabinet afin d’éviter que les pratiques illégales soient détectées ». Ce n’est pas tout. Sa plainte mentionne encore qu’il « craint » que le dispositif qu’il dénonce reste opérant dans la campagne des régionales 2021, au regard de la composition inchangée des équipes du candidat Alain Rousset. Le parquet national financier a ouvert une enquête préliminaire pour détournement de fonds publics. De son côté, le président de la collectivité Alain Rousset avait réagi dans Sud-Ouest : il était « serein », et, dans La Dépêche, le 04 mai, il a nié en bloc « les allégations le mettant en cause ».

« Mon licenciement est une éviction politique »

« Mon licenciement est une éviction politique ». Le 27 janvier 2020, David Angevin est remercié par le conseil régional de Nouvelle-Aquitaine. Après avoir, jusqu’au 1er mars 2018, appartenu au cabinet d’Alain Rousset, dont le conseiller technique était « la plume », il était devenu directeur de projet Université du Futur au sein de la délégation du pôle développement économique et environnemental. En février 2019, des difficultés privées mais aussi un burn-out proprement professionnel plongent David Angevin dans une « profonde dépression ». Il enchaîne les arrêts maladie, avant finalement un « arrêt maladie simple à demi-traitement ». Le 1er décembre suivant, il est affecté à Poitiers, en conservant son poste de directeur de projet. Le 19 décembre, son licenciement pour « insuffisance professionnelle » est manifestement « envisagé ». Il lui sera en effet signifié fin janvier 2020. Le 05 mars 2020, son avocat saisit le président de la Région « dans le cadre d’un recours gracieux » pour être réintégré dans ses fonctions au sein de l’institution publique. Le 07 avril 2020, Alain Rousset refuse. David Angevin porte alors sa requête devant le tribunal administratif (TA) de Poitiers, en urgence (procédure en référé) : l’ancien collaborateur veut que cette décision de licenciement soit suspendue et annulée. Si le TA considère que l’ « urgence » ne tient pas, la  procédure au fond court toujours.

« L’argent public ne vous appartient pas »

« Au cœur de cette mise à la porte, il y a une grosse prise de tête avec le vice-président au développement durable Nicolas Thierry » -aujourd’hui candidat écologiste aux régionales 2021, comme le PS Alain Rousset, qui brigue un 5mandat. Le chemin de David Angevin vers la sortie a été rapide, et, si le conseiller régional PS François Vincent, co-responsable du projet Université du Futur, aujourd’hui tête de la liste régionales 2021 du candidat Alain Rousset « (l’)a toujours défendu », il a fini lui aussi par le lâcher. « Au moment où l’on a demandé ma tête ». David Angevin soutient qu’ « ils sont allés très loin dans les menaces ». Ainsi, tant pis si, pour le prévenir qu’ « on sa(vait) des choses sur (lui) qui p(ouvaient) être désagréables », il a fallu à un chargé de mission aujourd’hui promu à un poste très proche du président de la Région, faire le trajet Bordeaux-Poitiers (255 km par la route). Le brandissement des fameuses « choses », au demeurant « fausses », glissent sur David Angevin comme sur les plumes d’un canard. C’est la « censure d’une conférence » qui serait à l’origine de la disgrâce de ce proche collaborateur… parce qu’il ne peut pas l’entendre : que des contributions puissent être écartées au motif qu’elles n’entrent pas dans la ligne idéologique du vice-président Nicolas Thierry, non, ça ne passe pas, et il n’est en outre pas tenté d’apprendre à l’intégrer. Son point de vue est inchangé aujourd’hui. « Censurer un intervenant parce qu’il ne pense pas comme soi, c’est déjà dingue ! ». David Angevin avait voulu croire que ce type de raffinements étaient réservé à des gouvernances du type de celle qui prévaut en Union soviétique. La censure d’un participant à une conférence de l’Université du Futur est intervenue « pour faire plaisir aux Verts », maintient le plaignant. David Angevin précise avoir alors expédié un mail au président Alain Rousset, à son directeur de cabinet et au directeur général des services pour dire le sentiment que cette intervention lui inspirait. Il a notamment glissé que « l’argent public ne (leur) appart(enait) pas ». À l’époque, instantanément, il « sait » qu’il met le doigt dans un engrenage qui va le happer tout entier. Mais il est dans l’incapacité de s’empêcher de leur faire part de la première question qui vaille à ses yeux.

Des accusations si graves et si étayées que le PNF est saisi

« Le PNF m’a auditionné une dizaine d’heures en avril dernier. Et de nouveau après qu’une trentaine de policiers ont perquisitionné le conseil régional ». Pour rappel, initialement, David Angevin a déposé plainte contre X auprès du parquet du tribunal judiciaire de Bordeaux, le 03 mars 2021, en pariant que les faits délictueux qu’il décrivait étaient passibles de la qualification de « détournement de fonds publics ». Avec « plusieurs milliers de pièces » pour étayer ses accusations. Au vu de ce nombre phénoménal d’éléments en appui, de la « gravité » des faits évoqués, le tribunal de Bordeaux transmet le dossier au PNF pour qu’il prenne en charge l’instruction. Ce transfert est officiel le 25 mars 2021. Désormais, le PNF pourrait souhaiter entendre des personnes employées par la Région, ou bien élues. Ce qui pourrait signifier une trentaine d’auditions en perspective, car c’est « au bas mot » l’effectif des personnes qui auraient été « impliquées 24 heures sur 24 dans la campagne des régionales 2015 d’Alain Rousset, y compris les départementales ». La lecture d’une pièce du dossier laisse au passage accroire que des élus « de gauche » du Département de la Dordogne ont été eux-mêmes destinataires de messages électoraux du candidat Alain Rousset, et il est alors difficile d’écarter l’idée qu’ils ne visaient pas à les convaincre de devenir eux-mêmes des relais de sa propagande électorale. Il apparaît en tout cas que Le PNF et la police judiciaire prennent très au sérieux les faits étayés rapportés par David Angevin. Reste qu’au vu du caractère « volumineux » des éléments qu’il a aussi fournis en appui, il ne semble pas surprenant que l’enquête soit toujours en cours.

« Quand un élu détient le pouvoir depuis près d’un quart de siècle, son entourage se sent redevable de plein de choses »

« Ces gens (qui se retrouvent impliqués) ne sont pas responsables, c’est Alain Rousset qui est en cause ». Un président de Région que David Angevin décrit comme étant à la tête d’un « système bien huilé avec, même, une opposition… qui ne s’oppose pas ». Les « renvois d’ascenseur » rendraient conciliant à souhait. À la région Nouvelle-Aquitaine, il règne, poursuit-il, « le sentiment d’être intouchable, et un sentiment d’impunité » -ce dernier serait si ancré que la question de la prise de précaution(s) serait d’ailleurs traitée, de facto, avec un tantinet de légèreté. Toutefois, il n’y aurait dans ce « système Rousset » rien que d’assez banal en réalité : quand un élu détient le pouvoir depuis presqu’un quart de siècle, défend en résumé David Angevin, inévitablement, les personnes de son entourage se sentent « redevables de plein de choses ».

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