
Suite à l’anéantissement du projet de déviation de Beynac prononcé par le Conseil d’État le 29 juin, le président du Département de la Dordogne Germinal Peiro a indiqué, le 4 juillet, qu’il disposait d’ « au moins une centaine de personnes » à même de répliquer les actions des zadistes, qui avaient bloqué le chantier de construction… pour empêcher celui de sa démolition. Or, au nom de la collectivité, il avait, comme il l’avait annoncé, fait appel sur les intérêts civils de la relaxe du zadiste Jérémy Kerdraon, qui, en se perchant sur une grue en novembre 2018, avait fait stopper le chantier de la construction. Le trentenaire d’origine toulousaine est en effet de nouveau convoqué devant la justice, le 4 septembre prochain.
« Pour empêcher un chantier, y’a pas besoin d’être 10 000 (…) Mais je connais devant moi au moins une centaine de personnes qui iront faire ce qu’ont fait les zadistes (…) Et vous verrez que ça n’avancera pas si vite que ça ! ». Après que le Conseil d’État a fait tomber le couperet sur le projet de contournement routier de Beynac le 29 juin, le président du Département de la Dordogne Germinal Peiro a donc appelé à s’inspirer d’actions qui ont déjà été menées par les opposants au projet. Ces actions qui avaient conduit deux d’entre eux devant le tribunal correctionnel de Bergerac, le 20 août 2019, pour « violence ou voie de fait à l’exécution de travaux publics ou d’utilité publique ». Seul Jérémy Kerdraon avait fait le déplacement, le second prévenu Arnold Tropée ayant séché cette audience comme il l’avait déjà fait la première fois que cette affaire devait être jugée, le 26 mars.
« Vous prétendez que la justice a été manipulée (…) mais que faites-vous, vous-même ? » (le procureur de Bergerac au prévenu Jérémy Kerdraon)
Au terme de son réquisitoire, le procureur Odile de Fritsch, qui avait pointé que, « objectivement, on ne sa(avait) pas où l’on (allait) dans cette affaire », avait toutefois fermement refusé la demande de relaxe du conseil de Jérémy Kerdraon Me Guillaume Tumerelle et réclamé la condamnation des deux mis en cause à 5 mois de prison et 150 heures de TIG. Le parquetier venait notamment de souligner qu’ « il ne s’agissait pas de résistance passive », et de demander à Jérémy Kerdraon qui « prétendait que la justice était manipulée » ce qu’ « (il) faisait lui-même ».
Dans cette affaire, le Département s’était porté partie civile : l’arrêt du chantier lui avait causé un préjudice estimé à 47 606 € -de son côté, Bouygues, également partie civile, estimait le sien à 45 000 €.
Le 20 août 2019, Jérémy Kerdraon (ainsi que Arnold Tropée, dont Me Pierre-Emmanuel Barois avait dès l’ouverture de l’audience, renoncé à assurer la défense) allait pourtant être relaxé par le tribunal correctionnel de Bergerac.
Son défenseur Me Guillaume Tumerelle avait en effet d’abord repris le représentant du ministère public, qui avait indiqué ne pas savoir où allait mener le contentieux de la déviation de Beynac. « Si l’on ne sait pas où l’on va, on sait où l’on est », avait-il martelé. Ainsi, après que le Conseil d’État avait suspendu les travaux le 28 décembre 2018, le tribunal administratif de Bordeaux avait, le 09 avril 2019, annulé l’arrêté préfectoral d’autorisation du chantier signé par le préfet de l’époque Anne Baudouin-Clerc. De fait, avait poursuivi le conseil, « l’arrêté n’existe pas et, la jurisprudence l’établit, c’est rétroactif ». Total, concluait-il : s’opposer à des travaux illégaux n’est pas condamnable.
Le parquet n’avait pas fait appel de ce jugement. Le Département, si, sur les intérêts civils, seul volet sur lequel la collectivité pouvait tenter de revenir. Autrement dit sur ses demandes de dommages et intérêts.
À savoir si la collectivité va maintenir son appel, maintenant que son président encourage à imiter les pratiques des zadistes.