
Ribérac devrait être un des points chauds des municipales en Dordogne. Au dernier scrutin, la ville avait rompu avec la tradition, en tournant le dos au PS : c’est l’alors UMP Patrice Favard qui s’installait aux commandes. En mars prochain, le maire sortant repart. Il va trouver sur sa route deux concurrents, Philippe Chotard (SE) et Nicolas Platon (PS). Aujourd’hui, la parole est à Patrice Favard, qui conduit la liste Continuons ensemble pour Ribérac.
À Ribérac, le maire sortant Patrice Favard veut faire un nouveau mandat. Il mène une campagne sobre, en mettant en avant son bilan et en dévoilant petit à petit son projet, dont l’ensemble devrait être connu mi-février. Une campagne à l’image du nom de la liste qu’il emmène, en somme : Continuons ensemble pour Ribérac. Le choix du classicisme est délibéré : la « politicaille », très peu pour le candidat Favard, qui n’entend pas s’y abaisser : vive la direct attitude. Pas question pour autant de ronronner face aux discours de ses concurrents : le maire sortant procède donc à quelques recadrages.
Candidat rassembleur
« Sur ma liste, il y a des gens de droite, de gauche, du centre, et, parfois, des sans étiquette ». Si Patrice Favard « ne renie ni (ses) engagements passés, ni (ses) valeurs », il souligne qu’il est un candidat « sans parti »… lui. Non, à sa sortie de chez Les Républicains, en février 2018, il n’a finalement jamais adhéré au courant La France audacieuse de Christian Estrosi. C’est que la fonction de premier magistrat est passée par là. « À la mairie, j’ai travaillé avec des gens de tous bords, de la gauche de la gauche à la droite ». La preuve que son marquage politique n’a pas empêché qu’on ait eu envie… et qu’on ait donc toujours « envie, de quelque famille que l’on vienne, de travailler avec (lui) ». Bref, qui cherche un candidat rassembleur en tient un. « Nicolas Platon annonce une liste à gauche »… et pourquoi pas, d’autant qu’« il assume sa tutelle ». En revanche, du côté de Philippe Chotard, le maire sortant peine à comprendre qu’ « il veu(ille) bien du soutien de Bernard Cazeau… mais pas de son étiquette La République en marche (LREM) ». Derrière ces deux candidatures concurrentes à la mairie, y aurait-il guerre des chefs Germinal Peiro-Bernard Cazeau ? « Dès septembre dernier, j’avais parlé de règlement de comptes à OK Ribérac… ». Donc, oui pour le numéro Un de Continuons ensemble pour Ribérac, pour qui une question demeure cependant, concernant le candidat Chotard. « Ce qui est étrange à mes yeux, c’est que Bernard Cazeau en a contactés d’autres avant… ». Reste qu’il laisse à Nicolas Platon l’analyse qui appartient à Platon Nicolas, au sujet de l’ambition sénatoriale d’un « Énarque et Parisien, qui, question de culture, est déconnecté de la réalité… et qui vient au pays… car il n’y revient pas » pour résumer. Ah, au passage, malgré son entrée en campagne tardive, la liste de Patrice Favard est bouclée -peut-être un nom lui manque-t-il encore ?… et la rumeur s’est trompée en faisant état de « difficultés » à la constituer.
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Binôme « clanique » Bernard Cazeau-Philippe Chotard : « Qui est Don Quichotte, qui est Rossinante ? »
« J’ai prévenu ma nouvelle équipe : être élu, ce n’est pas à la carte. Quand on a 47 ou 48 conseils municipaux, on ne fait pas que prendre ce qui plaît ». Patrice Favard sait que des départs brusques dans son team précédent lui sont reprochés, ses concurrents y voyant même le signe d’une culture de la division. « La division, c’est un mal de ces dernières années. Regardez Périgueux, Mussidan, Saint-Astier… ». Pas de quoi cependant éviter d’entrer dans le détail de la série de démissions auxquelles le maire sortant a eu à faire face. Sans donner de noms toutefois, sans s’attarder sur l’exactitude des effectifs des partants, non plus. En dehors « des personnes parties pour raisons professionnelles », il convient qu’ « un débat au sujet de la subvention d’une association » a entraîné « une ou deux démissions ». Logique, à ses yeux : c’était le signe d’ « une non-adhésion à la politique de l’équipe ». Sur les deux autres démissions d’adjoints qui ont suivi, Patrice Favard rappelle qu’elles sont intervenues au bout de 5 ans et 8 mois pour l’une, et de 5 ans et 10 mois pour l’autre. « Ces deux-là, c’est purement politique ». Comprendre : la politique comme il ne la goûte guère. En tout état de cause, le maire sortant « nie fermement la gestion clanique » dénoncée par le rival Philippe Chotard. Si, « en assistant à deux ou trois conseils municipaux », ce dernier a assisté à des « affrontements animés », il découvrait « l’expression de la démocratie ». Or, ce n’est pas « l’action politique ». Alors, retour à l’envoyeur : « la gestion clanique, c’est plutôt le binôme Philippe Chotard–Bernard Cazeau, qui me fait penser à celui de Cervantès ». La seule question qui reste à se poser selon lui est «de savoir qui est Don Quichotte et qui est Rossinante ».
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Surendettement : « En devenant maire, il me restait à rembourser ! »
« J’ai répondu à la chambre régionale des comptes il y a 8 jours. Dès que j’aurai son rapport définitif, je le ferai connaître en conseil municipal ». Patrice Favard respecte la loi : il est interdit de communiquer sur les observations des magistrats, tant qu’elles sont provisoires. Apprendre que Philippe Chotard jugerait utile d’avoir connaissance du document définitif l’amuse. « En mai, il a tenté d’avoir tous mes élus. Il en a récupéré un ou deux. Il connaît donc la situation des finances. Nicolas Platon, aussi, au demeurant », sachant que ce concurrent-là n’a, lui, pas feint de s’en montrer curieux. Et pour cause, selon Patrice Favard. « Il suffit de lire un budget, un compte administratif… ». De surcroît, ne pas compter sur le candidat Favard pour nier l’évidence. « La situation budgétaire de Ribérac reste fragile. Même si le capital restant dû va passer sous les 9 M€ ». C’est environ 3 M€ de moins que quand il s’est assis dans le fauteuil de maire, en 2014. Le « Vous n’avez plus rien à faire à Ribérac ! » de Bernard Cazeau résonne encore dans la mémoire de Patrice Favard. Qui lui avait répliqué : « Si ! Il me reste à rembourser ! ». Le surendettement de Ribérac, le candidat Favard se sent à l’aise pour en parler. « 75% de l’endettement actuel a été fait avant moi ». À ceux qui aspirent à plus de renseignements, il renvoie, sans surprise, vers Bernard Cazeau, mais aussi vers Rémy Terrienne. Patrice Favard, lui, se targue en outre de s’être attaqué au mal en profondeur, en se préoccupant conjointement de la fiscalité, notoirement onéreuse sur la commune … et il se prévaut d’un résultat : Ribérac est monté sur la 2e marche du podium pour sa plus faible hausse des taux, au terme d’une étude menée par l’Observatoire national des taxes foncières sur les propriétés bâties sur la période 2013-2018. Mener une campagne sobre, c’est s’en remettre aux faits. À tous, au demeurant : est-ce sa faute s’il est devenu maire en même temps que Manuel Valls amputait l’engagement de l’État dans le budget des communes ? Au micro de Liberté FM, le candidat Favard a évalué la mesure à une perte de recettes de 300 000 € pour Ribérac.
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« Le pôle de santé a été voté par l’opposition »
« La désertification médicale avait été identifiée depuis 15 ans ». Mais c’est à lui, le maire Patrice Favard, qu’il est revenu de cautériser la plaie « dans les six ans, dans l’urgence ». Au passage, merci à l’ancien élu Nicolas Platon : « sur le plan de la santé, il n’a rien fait ». Quant à Bernard Cazeau, soutien de Philippe Chotard -équité dans la distribution de taquets aux concurrents- « il n’a pas fait grand-chose ». C’est en 2018 que Patrice Favard étudie le projet d’une maison de santé publique. « Or, au plan financier, c’était compliqué ». Alors, oui, la tête de liste de Continuons ensemble pour Ribérac « a refusé » l’hypothèse d’une maison communale de santé avec des médecins salariés. « Nous n’en avons pas les moyens ». À raison de 35 h de travail hebdomadaire – les médecins d’aujourd’hui ne sont pas ceux d’hier- « il faut en prévoir deux pour en avoir un en permanence ». Sans compter qu’il aurait également fallu que la Ville prévoie la rénovation d’un immeuble. Sauf que les seules recettes sur lesquelles compter étaient les actes. « Insuffisant pour compenser les dépenses ». Dans le même temps, le candidat Favard rafraichît les mémoires. « La communauté de communes du Pays ribaracois (CCPR) n’a jamais manifesté la volonté de prendre la compétence santé ». Total : quand des investisseurs ribéracois « viennent (le) voir », le premier magistrat est séduit. Les preuves d’amour pour la cité sont éloquentes : ils mettent 2,5 M€ sur la table, « tirés de leur fonds propres ». Leur projet devrait se concrétiser en avril ou mai prochain et un premier médecin est attendu le 1er juillet. « Nicolas Platon parle de maison départementale de santé : c’est condamner les investisseurs ribéracois, quand, au contraire, il faut donner toutes ses chances à leur maison médicale ». Et ce serait « à la limite, de la concurrence déloyale », au regard de la nature publique du soutien sonnant et trébuchant de ce projet-là. Aussi le candidat Favard « voit difficilement l’agence régionale de santé donner son feu vert ». Même si, de son côté, le projet privé en route va bénéficier lui aussi un peu d’argent public : 10 000 € annuels, « à condition, à chaque exercice, de respecter notre cahier des charges », auxquels s’ajoute le bénéfice de la valise médicale, votée en conseil communautaire mardi 04 février 2020. Allez, le sujet est clos… sur un nouveau souvenir. « L’opposition a voté pour le pôle de santé ». Fermez le ban.
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Subventions aux associations : un faux procès
« Mes concurrents me reprochent un traitement partisan des associations… Je retourne la question : sur quoi s’appuient-ils ? ». Car pour Patrice Favard, cette allégation n’est pas vraie, « au contraire ». D’ailleurs, la vie culturelle à Ribérac, c’est lui qui l’a allongée à l’ensemble de l’année. Sans jamais se mêler de la programmation, qui est « la liberté des acteurs culturels ». Il se félicite que « le Fest’in ait aimanté 6 000 visiteurs en 2019 ». Alors, sur ces fameuses subventions, où se niche le lézard ? « On ne subventionne ni les associations départementales, ni les associations nationales ». Donc, en avant la précision. Solidarité ribéracoise est-elle équitablement soutenue ? « En 2014, Solidarité ribéracoise a bénéficié de 200 € ; en 2015 aussi ; en 2016, en 2017 et en 2018, le dossier de demande de subvention lui a été transmis et il ne nous a pas été retourné. De ce fait, la mairie n’en a pas expédié en 2019, ni en 2020 ». CQFD : c’est un faux procès qu’on intenterait à Patrice Favard.
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Contournement de Ribérac : « un sujet de compétence départementale sur lequel tous les Ribéracois doivent s’exprimer »
« Germinal Peiro m’a garanti qu’en 2021, toutes les acquisitions foncières seraient faites ». C’est aussi le président du Département de la Dordogne qui, en 2015, avait indiqué à Patrice Favard que la collectivité « n’a(vait) pas les moyens » de réaliser le contournement de Ribérac, avant, « plus tard », de déclarer que « juridiquement, tout serait fait ». Le maire sortant se souvient que « fin 2013, quand le tracé a été présenté », le commencement des travaux était prévu pour « début 2017 ». Pour mémoire, Philippe Chotard maintient que « quasiment toutes les parcelles sont acquises » (65 sur 70) quand Nicolas Platon soutient le contraire. En tout cas, Patrice Favard est sûr que la voilure (« 6 M€ ») annoncée par le candidat Chotard est « impossible », d’autant qu’initialement, le projet était estimé à 14 M€. Aussi, les 20 M€ annoncés par Nicolas Platon pourraient être un peu exagérés. Passons, car c’est l’intérêt du contournement qui occupe le candidat Favard pour qui il y a du pour et du contre. Respectivement, « sortir les poids-lourds » du cœur de Ribérac, qui passent au rythme journalier de « 400 à 450 » à des endroits loin d’être idéaux, en effet ; ou « risquer de voir aussi les voitures contourner le centre-ville » -il y en aurait « 8 500 par jour ». Sachant que la déviation de Ribérac relève de la compétence départementale, Patrice Favard veut que « tous les Ribéracois puissent donner leur avis » -la voix des commerçants doit notamment être entendue. C’est qu’une enquête publique ne sonderait que les habitants situés sur le trajet. Aussi entend-il proposer une consultation citoyenne.