
Le souffle des habitants de la Dordogne est suspendu à la décision de la cour administrative d’appel de Bordeaux, qui doit décider, mardi 10 décembre 2019, si le projet de contournement de Beynac est, oui ou non, d’intérêt public impératif majeur. Pendant ce temps, des avis d’élus, émis publiquement… il y a longtemps, remontent à la surface : les archives ont la mémoire dure. Parmi ces déclarations définitives, celle, en 1994, de Fernand Peiro, ex-maire de Vézac (1977-1995) et père de l’actuel président du Département de la Dordogne Germinal Peiro, des ex-présidents de la collectivité Gérard Fayolle (1992-1994) et Bernard Cazeau (1994-2015) ou encore du maire de La Roque-Gageac Jérôme Peyrat, en 2002, devenu en mai 2019 conseiller politique du Président de la République Emmanuel Macron.
Pour re-contextualiser les propos que les archives gardent au chaud, voici quelques dates-clés qui amènent à celle de l’évènement commenté par les élus :
10 juillet 1985
Le conseil général de la Dordogne décide de créer une voie suivant la vallée de la Dordogne entre Bergerac et Souillac, par Sarlat.
29 mars 1989
Le conseil général de la Dordogne adopte le projet des déviations des RD703 et RD49 à Beynac. Ce projet s’appelle désormais La Voie de la Vallée de la Dordogne.
11 juillet 1990
L’opération d’aménagement de La Voie de la Vallée de la Dordogne est déclarée d’utilité publique.
16 février 1992
À la suite d’un recours auprès du tribunal administratif soutenu par un collectif d’associations, la déclaration d’utilité publique est annulée.
22 décembre 1992
Le conseil général réaffirme son projet de déviation des RD703 et RD49 à Beynac, avec une variante à Vézac.
22 août 1994
Un enquête d’utilité publique est réouverte.
28 octobre 1994
La commission d’enquête d’utilité publique émet un avis défavorable à la réalisation de la Voie de la Vallée de la Dordogne présentée dans ce second projet.
1er décembre 1994 : le conseil général vote la saisie du conseil d’État (seul Gérard Fayolle empêche l’unanimité, en s’abstenant) après l’avis défavorable de la commission d’enquête ; le projet de La Voie de la Vallée continue
26 février 1995 le oui l’emporte très largement lors de la consultation populaire organisée, malgré le risque juridique (la campagne électorale des municipales est lancée), dans les communes de Beynac, Castelnaud, Saint-Vincent-de-Cosse, Vézac, à près de 82%, sachant que le taux de participation est quasiment de 70% (L’Essor sarladais 03 mars 1995)
Gérard Fayolle juge que le Département n’a pas les moyens
Gérard Fayolle, alors conseiller général du Bugue et ex-président du conseil général, réagit au revers infligé à la collectivité par la commission d’enquête publique (Sud Ouest décembre 1994)
« J’ai toujours préconisé de ne pas faire de route et de ponts dans le triangle d’or, mais qu’il fallait trouver un passage dans les collines pour les gens pressés -les autres prenant leur temps par la vallée. En tant qu’ancien président du conseil général, je me suis abtenu ou j’ai voté contre la voie de la vallée, en raison de sa menace sur le patrimoine périgourdin. Le résultat de l’enquête est une chose raisonnable. Et connaissant ses finances, le Département n’est pas en état de payer la Voie de la Vallée »
Max Albospeyre à deux doigts de dire que « Beynac doit prendre le deuil »
Max Albospeyre, alors maire de Beynac-et-Cazenac réagit au revers infligé à la collectivité par la commission d’enquête publique (Sud Ouest décembre 1994).
« C’est regrettable. Je ne dis pas que Beynac doit prendre le deuil. Mais je n’en suis pas loin. La solution de La Voie de la Vallée est la plus logique. Quant au tracé numéro 3, il est aberrant. C’est un gag. C’est un tracé épouvantable qui va nécessiter des travaux considérables avec des pentes demandant une voie spéciale pour les poids-lourds. Si on fait une déviation, il faut qu’elle serve à quelque chose. Les études réalisées démontrent que la voie n°3 ne déviera même pas 10% du trafic de transit. Alors à quoi bon ? Ça me navre, parce que l’on va perdre du temps »
Fernand Peiro : « cette voie de la vallée se fera »
Fernand Peiro, alors maire de Vézac, réagit au revers infligé à la collectivité par la commission d’enquête publique (Sud Ouest, décembre 1994).
« Comme l’écrivain Nicolas Chamfort : laissons-les avoir raison parce que les pauvres, ils n’ont pas autre chose. Quant à moi, je n’ai que l’intérêt général en vue. Cette voie de la vallée se fera »
Germinal Peiro dénonce des « moyens fallacieux »
Germinal Peiro, alors conseiller général de la Domme, réagit au revers infligé à la collectivité par la commission d’enquête publique (Sud Ouest, décembre 1994).
« La commission a tenu compte des 45 000 signatures recueillies au château de Castelnaud. Ce n’est pas normal. Ces gens ont signé de bonne foi car on leur a fait une présentation catastrophique de ce projet. Ce n’est pas sérieux. Ces signatures ont été obtenues par des moyens fallacieux. Quant à l’itinéraire n°3, c’est une folie furieuse. De toutes façons, il ne se fera jamais. Enfin, il est anormal que l’on ait confié le rôle de commissaire enquêteur à un proche parent d’une personne devant être expulsée par la Voie de la Vallée »
Bernard Cazeau se préoccupe du « plan écologique »
Bernard Cazeau est alors président du conseil général de la Dordogne (Le Figaro, le 21 novembre 1995).
« … le projet de tracé nord n’a jamais été sérieusement étudié. Il est d’ailleurs aussi désastreux que l’autre sur le plan écologique »
Jean-Jacques de Peretti déplore « un entonnoir problématique »
Jean-Jacques de Peretti, alors maire de Sarlat, à quelques jours de la réunion publique qui aura lieu à Vézac (Sud Ouest 26 février 1999).
« Compte-tenu de la procédure, des finances et du calendrier, il faut que l’on considère ce qui est prioritaire. Cela ne sert à rien de fluidifier autour de Sarlat dans la mesure où l’on reste à buter sur un entonnoir problématique »
François Carvès refuse « une route parfaitement inutile »
François Carvès, alors habitant de Calstelnaud-la-Chapelle et président de l’association de défense des sites de Vézac et des communes limitrophes, à quelques jours de la réunion publique qui aura lieu à Vézac -même s’il prévient qu’il attend de voir– paraît peu enclin à rejoindre les rangs des défenseurs du projet (Sud Ouest 26 février 1999)
« Nous n’avons pas changé d’avis, il n’y a pas de raison. C’est parfaitement inutile de faire cette route. Il y a des éventualités plus faciles et moins onéreuses (…) Il ne faut pas casser le paysage. On va s’orienter selon ce qui va nous être présenté »
Jean-Claude Castagnaud : il faut agir car « à Beynac, la situation est catastrophique»
Jean-Claude Castagnaud, alors maire de Vézac, à quelques jours de la réunion publique qui aura lieu précisément à Vézac, s’affiche, lui, un fervent soutien du projet (Sud Ouest 26 février 1999).
« J’en entends parler depuis dix ans. Il faut faire quelque chose car la situation est catastrophique à Beynac. À l’image des Anciens qui faisaient les routes dans la vallée, la déviation doit passer dans la vallée. On a déjà pris trop de retard, comme pour la déviation de Sarlat »

… et le projet de Beynac est ré-enclenché
C’est l’heure de réintroduire les éléments, nouveaux, qui permettent de re-contextualiser les propos publics tenus par les élus : le conseil général de la Dordogne poursuit l’objectif d’un contournement de Beynac.
31 octobre 2000
Le conseil général propose un projet que les opposants estiment « quasi identique au précédent« … Une nouvelle enquête préalable à la déclaration d’utilité publique est ouverte le 31 octobre 2000.
28 février 2001
Malgré la mobilisation des opposants, la commission d’enquête émet un avis très favorable.
26 décembre 2001
Le préfet de la Dordogne Thierry Le Roy a déclaré les travaux à exécuter pour l’aménagement de La Voie de la Vallée de la Dordogne d’utilité publique. Dès février 2002, le collectif d’associations de défense de la vallée de la Dordogne dépose un nouveau recours auprès du tribunal administratif de Bordeaux pour faire annuler la décision du préfet.
Jérôme Peyrat doute du libre-arbitre des élus
Jérôme Peyrat est déjà maire de La Roque-Gageac et président de la communauté de communes du Périgord noir (Sud Ouest, 15 janvier 2002)
« … Tous les institutionnels sont pour : la DDE, le député, le conseil général et le conseil municipal de Sarlat alors qu’il s’agit de dépenser 280 M de francs. Je souhaiterais que cette enquête publique soit prolongée. Elle ne s’est pas déroulée dans de bonnes conditions, à savoir pendant les fêtes ou en période électorale avec des élus de petites communes sommés de se prononcer « pour ». Face à ces institutions, je ne suis pas sûr que leur libre arbitre soit entier. Je suis même certain que certains ne disent pas ce qu’ils pensent pour ne pas se mettre à dos cette somme d’autorités. J’ai trouvé choquant qu’à propos de la réunion du pays du Périgord noir, à Vézac, le 23 décembre, Germinal Peiro invite les élus à signer favorablement le registre d’enquête publique. Cette méthode est un peu autoritaire. Le projet correspond à une nécessité, mais réfléchissons bien avant de jeter deux ponts sur la Dordogne et de modifier notre paysage. Je ne suis ni écolo, ni aristo, ni propriétaire de château mais je m’interroge sur la voie Peiro-Cazeau »
Bernard Cazeau qualifie les opposants de « Périgourdins attardés »
Bernard Cazeau est alors président du conseil général de la Dordogne (Sud Ouest, 12 avril 2002).
« … Si la déviation de Beynac ne passe pas par-là, alors on ne la fera jamais. J’ai fait les concertations nécessaires. Maintenant, ça suffit ! Ou le Département passera ou ça cassera. Je ne cèderai pas aux jérémiades et aux intérêts particuliers de quelques Périgourdins attardés qui essaient de nous empêcher d’avancer »
bonjour, je reviens sur cet article qui reprend les « étapes » du dossier du projet de contournement de Beynac-et-Cazennac … Monsieur François CARVES n’a jamais été Elu et encore moins Maire de ce Village … si vous pouvez apporter la modification, je vous en saurais gré ! bonne fin de journée à Vous et Merci pour ces recherches « historiques » … Cordialement
Bonsoir à vous, merci de votre vigilance. La correction a été faite, pourvu que l’opération « mise à jour » soit vite, vite effectuée. Bonne soirée ds l’immédiat.
C’est tout simplement édifiant mais très clair que d’énergie et d’argent dépense en procédures